Butinages et papottages .... (Suite)

Mila, était silencieuse depuis plusieurs minutes. Je ne savais comment l'inciter à se confier à moi, sa nouvelle amie, sans trop la brusquer. J'optai pour la légèreté qui me caractérisait tant:

― Vous ai-je raconté mon enfant, ma vie d'avant ? Je suis sure que vous ne devinerez jamais comment j'occupais mes journées !

En la sentant sursauter, je souris car j'avais de nouveau réussi à capter toute son attention.

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Farfadet ou pas, je ne tenais pas à rencontrer de créatures magiques à la nuit tombée, et plus encore en sachant que l'une d'elle avait attaqué Bobby. Par ailleur, je n'étais pas tout à fait habituée à l'idée que les contes de fées comportaient de grandes parts de vérité... y compris pour ce qu'il y avait de plus effrayant ! Heureusement, Rosa finit par me guider au jardin intérieur...

― Vous ai-je raconté mon enfant, ma vie d'avant ? s'enquit-elle alors que nous pénétrions dans la pièce. Je suis sure que vous ne devinerez jamais comment j'occupais mes journées !

― Vous étiez jeune actrice en recherche de gloire ? répondis-je doucement, en descendant les marches en fer.

J'avais essayé d'y mettre le ton mais il n'y était pas réellement ― mes pensées étaient ailleurs, concentrées sur Bobby...

Je souris. Mila me trouverait peut-être folle mais je me donnais pour but de lui enlever le pli soucieux qui reliait ses deux sourcils.

― Non ma chère, que nenni. Ça c'est la partie visible de l'iceberg. Je pensais plus à autre chose. De ces choses que l'on ne dévoile qu'aux personnes en qui nous pouvons avoir toute confiance ...

Arrivée en bas des marches, je lâchai enfin son bras et tournoyai sur moi-même en chantonnant jusqu'à atteindre le banc en pierre sur lequel je m'assis. Ma robe bouffa, emportée par mon mouvement, enveloppant l'espace que je réservai à ma confidente. Je continuai à chanter l'air que je sentais de circonstance:

― Un jour mon prince viendra, un jour il me dira ces mots d'amour, si troublants et tendres que j'aurais tant plaisir à entendre ! Qu'il vienne, je l'attends, craintive et cœur battant, dans ses bras, alors, mon beau rêve enchanté deviendra réalité ! ...

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Un sourire affleura mes lèvres :

― Chanteuse à Broadway ou pour Disney ?

Mais mon ton était triste, les paroles faisant douloureusement écho en moi. A vrai dire, je ne comprenais même pas pourquoi j'étais dans cet état : Bobby était... un ami. Un ami. Un ami aux airs de chevalier servant...

Un chevalier qu'Alwena avait décidé de charmer...

Mais pourquoi est-ce que cela m'énervait autant ?

― Chanteuse à Broadway ou pour Disney ? proposa-t-elle un sourire aussi triste que son humeur aux lèvres.

Est-ce ainsi que l'on me percevait ? Comme une chanteuse ? Il est vrai que de chantonner du matin au soir pouvait porter à confusion. Cessant illico ma ritournelle qui ne semblait pas charmer Mila plus que ça, je revins vers elle et plantai mes yeux dans les siens. Je pouvais y lire le trouble et y déceler ses plus infimes pensées.

― Ma pauvre enfant, pourquoi vous mettre dans cet état ? Avez-vous si peu foi en vous ? Ce n'est pas ainsi que vous arriverez à vos fins. Il faut savoir prendre les armes quand la guerre se rapproche ...

Sans lui laisser le temps de réagir, je repartis en dansant et en chantonnant vers le banc de marbre et attendis qu'elle réagisse à mes propos.

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Je soupirai, regardant Rose s'éloignait, chantant et dansant gaiment.

― C'est... Bobby, finis-je par dire.

Mais je n'osais poursuivre : qu'allais-je dire ? Que j'étais jalouse...? C'aurait été d'un pathétisme...!

― C'est... Bobby, lâcha enfin Mila du bout des lèvres.

Je tapotai la place vacante à mes cotés attendant qu'elle me rejoigne. Une proximité était plus propice aux confidences.

― Il vous en aura fallu le temps jeune fille ! Si vous n'osez pas vous l'avouer à vous même, comment comptez-vous lui faire part de vos sentiments ?

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Je rougis ― si Rose savait, qui d'autre avait pu deviner mes sentiments ?

― Je ne peux les lui révéler, dis-je doucement. Je ne voudrais pas le mettre mal à l'aise... j'apprécie trop son amitié pour cela ! Et puis, cela ne plairait certainement pas à Alwena...

Je sentis mes poils se hérisser sur tout le corps à la simple évocation du prénom de l'infirmière.

― Je n'ai jamais porté Alwena dans mon cœur jeune fille. Donc si vous avez besoin d'aide pour l'évincer du tableau, je suis toute disposée à vous prêter main forte. Je n'ai jamais vu en elle qu'une opportuniste de bas étage. Malheureusement, Bobby ne semble pas de cet avis car il s'est fait alpagué dans les filets de la belle sirène en un rien de temps. A vous mon enfant, de la lui faire oublier ... Et si notre seule volonté ne suffit pas, libres à nous d'user de ce que cette école nous offre si généreusement. N'êtes-vous pas de mon avis ?

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La tête me tourna presque en entendant Rose me proposer de m'aider à charmer Bobby ― littéralement s'il le fallait ― tant d'émotions m'assaillaient : je n'étais pas habitué à ce que l'on me défendît, comme Bobby l'avait fait, ou m'épaula, comme Rose se proposait de le faire.

― Vous croyez que c'est possible...? Que je puisse le détourner d'Alwena ?

Mais qui voudrait d'une fille comme moi, sachant comment j'avais gagné ma vie pendant quelques années...? Non, impossible !

― Impossible n'est pas français ma chérie, clamai-je emportée par ma joie de la savoir enclin aux confidences.

Je me levai, entrainant une Mila légèrement choquée à ma suite.

― Que savez-vous faire mon enfant ? Quels sont vos atouts pour séduire un homme ? Ne me dites pas que vous n'en avez pas car je ne vous croirais pas, ajoutai-je en me retournant vers elle tout sourire.

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Mes atouts pour séduire un homme...! Mon apparence physique, pensai-je, mais Alwena était une belle femme qui savait elle aussi utiliser de son charme ; quant au plaisir que je savais provoquer chez eux, je préférais le taire.

― Je sais cuisiner..., finis-je par dire. Rien d'extraordinaire...

Mais que pouvais-je dire d'autre ? La danse ― que, de toute façon, je ne pouvais plus réellement pratiquer, pas comme professionnel, en tout cas ― ne me servait à rien...

― Vous savez cuisinez ? Pourquoi ne me l'avez-vous pas dit plus tôt ? Allons donc retrouver Jole. Nous avons un menu à concocter !

Je savais qu'elle avait hésité dans sa réponse mais je me contenterais de ces quelques progrès. Notre relation avait évoluée en un après-midi. Le temps viendrait bien où elle se confierait de son plein gré .. .

Je tenais toujours la main de Mila qui se laissa entrainer vers les escaliers. La cueillette des fleurs attendrait. Il y avait une cocotte sous le feu si je pouvais m'exprimer ainsi.

Je poussai de nouveau la chansonnette. Je me sentais d'excellente humeur subitement.

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― Si nous pouvions éviter de mêler Jole, demandai-je alors qu'elle m'entraînait. Millie est déjà fort jalouse et je crois qu'elle ne m'aime pas beaucoup...!

Pour ne pas dire "pas du tout" ― si elle pouvait me jeter dans la marmite, je ne doutais pas qu'elle le ferait !

― Mais qu'avez-vous en tête ? m'enquis-je, curieuse, alors que nous atteignîmes le haut des marches.

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