Malaise étrange

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Contrairement à ce que j'avais cru, je n'eus pas mal. Je sentais la Magie de l'infirmière en moi, mais c'était devenu une présence rassurante. Je me détendis et tentai de penser à autre chose - aux vacances qui approchaient - pour oublier ma douleur.

Un silence avait pris possession de l'infirmerie et le temps semblait s'être figé. Un peu abrutie, je me demandais depuis combien de temps j'étais là.

Ce fut alors que je sentis que Mademoiselle Butterfly passait à l'action. C'était une sensation aussi soudaine qu'étrange : je me sentis d'un coup ciselée. Je me raidis et ce que je craignais quelque minutes ne tarda pas à venir. L'infirmière se crispa aussi et continua à forcer en moi. Je résistai malgré moi - ma Magie, que je ne contrôlais pas, tentais de s'opposer à celle de l'infirmière.

Je me tordis dans tous les sens et mis du temps à comprendre que je laissais échapper des cris qui devaient résonner contre les murs de la pièce.

C'était horrible... J'avais la nette impression que ce que je faisais relevait plus de la torture que du soin. La jeune fille se tordait et criait de douleur comme si je la mettais au supplice.
"Concentre-toi pour en finir le plus vite possible", m'ordonnai-je.

Je m'étais engagée dans une petite faille et la Magie de Wynn avait de suite réagi en se resserrant autour de la mienne. C'est parce que je continuais ma progression en forçant quelque peu, qu'elle avait mal. Ses cris ébranlaient toute l'infirmerie.

Je progressai et, enfin, touchai le point de douleur que je cherchais depuis tout à l'heure. Je l'enveloppai de ma Magie, empêchant ainsi celle de Wynn d'oppresser ce petit point. Le résultat fut instantané : la Magie se retira, Wynn cessa de crier. Je restais encore quelques secondes puis me retirai de l'esprit de la jeune fille.

Le calme était revenu dans l'infirmerie, la malade avait fermé les yeux et reprenait sa respiration. Je m'appuyai sur mon bureau et passai une main dans mes cheveux pour tenter de reprendre moi aussi mes esprits. Ce qui venait de se passer était, de toute ma carrière, un cas unique.

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Je n'étais plus certain qu'Alwena pratiquait réellement des soins tant Wynn hurlait et que le visage de l'infirmière était crispé ― le tableau donnait plutôt l'impression d'un combat entre deux forces déchaînées qui se livraient bataille sans merci ; une bataille entre le bien et le mal, Wynn paraissant presque possédée... Alwena, elle, avait l'air d'une prêtresse vodoo se livrant à un rituel peu orthodoxe... Devais-je prévenir Merlin ?

Mais Wynn finit par se calmer et Alwena relâcha son effort et un soupir de satisfaction. Le silence était retombé, étrangement assourdissant...

...je n'osais pas même le briser pour demander ce qu'avait la jeune fille aux yeux améthyste.

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Le silence et la quiétude qui suivaient l'étrange intervention de Mademoiselle Butterfly me semblaient tels un havre de paix. Je n'avais plus mal, je ne me sentais plus déchirée, je n'avais plus l'impression que quelque chose en moi m'échappait, j'étais bien.

J'haletais encore et il me fallut quelques instant pour trouver une respiration régulière. De même, je n'osais bouger - j'avais peur, en me hâtant, de réveiller la douleur. Je savourais l'absence de douleur, la sensation d'être dans une boule de coton.

Je sentais aussi, presque brutalement, une fatigue m'envelopper, mes membres qui devenaient lourds. Pourtant, j'ouvris les yeux. La lumière m’éblouit un petit moment, comme lorsque quelqu'un ouvre soudainement les rideaux de la chambre encore engourdie de sommeil.

Lentement, je me redressais - la tête me tourna. Je passai ma main sur le front et remarquai qu'il était trempé de sueur. Cléophée était toujours là avec, à ces côtés, Bobby. Tous deux m'observaient d'un air inquiet. Je rougis, un peu honteuse que l'homme à tout faire m'aie vu en train de crier et de me débattre... Je me tournai alors vers l'infirmière qui semblait, elle aussi, se remettre de son effort.

- Que s'est-il passé, demandai-je d'une voix basse.

Je secouai la tête.

- Je n'en suis même pas sûre, finis-je par lâcher.

Je me redressai et, me dirigeant vers la jeune fille, lui pris le bras pour prendre sa tension. Un peu faible, mais rien d'inquiétant.

- Ta Magie est complètement déchaînée, débridée, sauvage, je dirai même. Et tu sembles n'avoir aucune prise sur elle. Elle fait ce qu'elle veut - pour le meilleure et pour le pire... D'où tes douleurs. J'ai réussi temporairement à canaliser ta Magie pour calmer ta douleur. Le problème est qu'elle risque à nouveau de te causer d'autres douleurs.

Je savais que si c'était le cas, les douleurs pouvaient devenir encore plus violentes. Je ne lui dis pourtant pas cela, sachant très bien que cela allait rajouter des angoisses supplémentaires. Je me tournai vers les deux visiteurs :

- Est-ce que vous pouvez quitter l'infirmerie, s'il vous plaît ? A moins que tu aies besoin de quelque chose, Bobby ?

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Je secouai la tête.

― Ca ira, dis-je.

Je n'étais venu qu'en curieux. Je me tournai alors vers la jeune fille aux cheveux bleus.

« Et toi, Cléophée ? Besoin de quelque chose ? »

― Non c'est bon, répondis-je, du moment que Wynn va mieux. Moi je vais bien.

Les cris de Wynn m'avaient vraiment fait peur, mais voir que la douleur avait quitté ses traits me rassurait.

Je leur adressai un sourire - ils ne devaient plus s'inquiéter à présent.

Je me tournai alors vers la jeune fille aux yeux violets. Je sentais dans son regard qu'elle n'était pas rassurée : ses yeux parcouraient la pièce et me scrutaient en même temps. Elle s'attendait sûrement à une très mauvaise nouvelle. Je pensai alors que je n'aurais pas du demander aux deux visiteurs de partir d'une manière si directe - en réalité, c'était seulement au nom du secret professionnel.

- Il n'y a rien de grave, m'empressai-je de dire, il faut seulement que tu t'occupes à maîtriser ta Magie - ce que tu apprends en cours.

Je contournai mon bureau qui disparaissait sous des dossiers et des instruments de soin, notant dans ma tête qu'il fallait absolument que je procède à un rangement, pour saisir sur une des étagères fixées au mur un pot contenant des boules rosées. C'était des petits bonbons qui, après un effort tel que celui que Wynn venait de subir, la requinquerait. Je l'invitai à en prendre une et ce fut d'une main tremblante qu'elle porta le bonbon à sa bouche.

- Sais-tu avec quel élément as-tu le plus d'affinités ? lui demandai-je alors en m'asseyant de nouveau sur mon bureau.

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Je hochai la tête en signe d'acquiescement.

― Tant mieux, fis-je.

Je ne connaissais pas Cléophée aussi bien que Wynn mais elle m'avait toujours eu l'air d'une gentille fille.

Je signifiais la porte d'un geste ample :

« Allons-y... »

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Je vis Bobby tenir la porte à Cléophée tandis qu'ils quittaient la pièce. Je lançai un petit sourire à mon amie avant de saisir le bonbon rond et rosé que me tendait l'infirmière. Je le mis dans ma bouche et fut frappé par l'agréable goût qui se diffusait sur ma langue. Sucré, doux et tonique à la fois ; l'effet fut immédiat : c'était comme si j'avais avalé une boule de bonne humeur et d'énergie.

- Sais-tu avec quel élément as-tu le plus d'affinités ? m'interrogea-t-elle en s'appuyant sur son bureau.

Je me remémorai le cours peu encourageant de Lestate - celui où il avait fallut jouer avec les flux des éléments - et dû reconnaître qu'il n'avait pas été une réussite.

- Non, je l'ignore, avouai-je avec une moue défaite.

A supposer qu'un jour je puisse être capable de faire quoi que ce soit avec ma maudite Magie !