Retenue

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Je suivais depuis un moment l'échange des deux garçons - ils étaient proches, une sorte de complicité naturelle les liant. Ils se renvoyaient les balles, comme un jeu, et je ne pouvais m'empêcher de les observer avec un sourire discret.

- Le Professeur Lestate parle des préliminaires d'une opération Élémentaire, rétorquai Morgan à Angelus. Ce n'est pas la même chose ?

Mon sourire s'élargit - il était bien anglais, celui là !

- Lestate ne doit pas avoir ma conception du mot "préliminaires", avança Death. Mais je serais toi, je le garderais à des fins plus... personnelles... Rien qui concerne un inventaire ou tout autre opération Élémentaire ou pas... N’êtes-vous pas de mon avis Wynn?

Je restai un moment bloquée, stupéfaite. C'était bien Angelus Death qui m'adressait la parole sans méprit apparent ? Méfie-toi, songeai-je.

- Je dois dire que, pour une fois, je suis de votre avis, Death. Le mot préliminaires connote effectivement quelque chose de très personnel. Cela dit, tout dépend du contexte...

Je laissai ma phrase en suspend, estimant que je n'avais pas besoin de préciser plus ma pensée.

- Vous en êtes donc aux prémices, récapitulai-je. Quel coin avez-vous fait ?

...Death ?

Elle devait le détester pour l'appeler ainsi !

J'aime Angel ; Wynn n'aime pas Angel ; donc, je n'aime pas Wynn. Logique, n'est-ce pas ?

― Au commencement, acquiesçai-je, reprenant le terme proposé par mon boyfriend, vers lequel je me tournai alors : « C'est quoi ton concept du mot 'préliminaires' ? » m'enquis-je avec la même innocence, faisant semblant à présent de vérifier ma liste... avant de poser une vraie question : « Angel... c'est quoi, un cartel ? »

La description "Style Louis XIV, avec dorures" ne m'aidait pas beaucoup...

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« Bobby Wolfe sera dans le débarras de 16 à 18 heures, » m'avait confié Morgan. Je ne savais s'il avait fait un crochet tout particulier pour me voir où s'il n'avait fait que passer par là...

« Et tu le sais...? » demandai-je en laissant ma phrase en suspend pour qu'il la finisse.

« Parce que je serai collé à cette heure, à cet endroit ? » avait-il répliqué comme s'il avait posé une question plus que d'y répondre, ses prunelles étincelantes d'espièglerie.

J'avais souris :

« Je passerai donc te voir... »

...lui et Bobby.

Avec du thé ― il semblait tout les deux aimer le breuvage.

Je me présentais donc à la porte du débarras, les bras chargés d'un plateau.

― Hey, fis-je en apercevant Bobby à travers la porte, en train de farfouiller dans un carton...

...toujours aussi beau...!

Je préférais ne pas relever le fait qu'elle ait utilisé mon patronyme et non mon prénom en s'adressant à moi, ni son "pour une fois ..."

Elle était pareille à Olympia. Le genre de filles qui ne devait pas supporter qu'on ne dise pas "Amen" à toutes leurs belles paroles.

Manque de pot, avec moi, c'était raté !

Je tentai donc de focaliser toute mon attention sur ma liste, faisant en sorte de l'ignorer du mieux possible, lorsque je captai la question que Morgan me posait :

― C'est quoi ton concept du mot 'préliminaires' ? Laquelle fut presque aussitôt suivie par une autre d'ordre plus impersonnel : "Angel... c'est quoi, un cartel ?"

― Un cartel ? répétai-je bêtement incapable de m'ôter sa première question de l'esprit ...

Je regardai autour de nous ce qui pouvait le plus correspondre au mot, mais à part "cartel colombien", rien ne me parlait et comme Monsieur Le Fay semblait d'humeur taquine, je décidai de l’être aussi :

"Demande plutôt à Mademoiselle ici présente, elle semble plus douée que moi question vocabulaire ... Peut-être pourra-t-elle même répondre à tes deux questions" répondis-je tout aussi innocemment que possible.

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Angelus Death détourna la tête, évitant mon regard. Manifestement, il n'était pas prêt à oublier notre prise de tête... Mémoire longue.

- C'est quoi ton concept du mot 'préliminaires' ? demanda Le Fay, les yeux dénués de malice.
Pourtant, il ne laissa pas le temps pour une réponse :
- Angel... c'est quoi, un cartel ?

Angel... Joli surnom - dommage que son propriétaire soit entêté. Le jeune homme hésita, cherchant une réponse qu'il n'avait manifestement pas.

Un bruit me fit tourner la tête vers l'entrée du débarras - là où était Bobby. Mila - il me semblait que c'était elle - tenait un plateau avec une théière et plusieurs tasses. C'était gentil de sa part de vouloir abreuver Bobby.
Mais c'était beaucoup moins sympa de sa part de le regarder avec insistance. Était-ce moi qui imaginais quelque chose qui n'existait pas ? Après tout, Mila faisait aussi partie du personnel et il était normal qu'ils soient amis.

Je ne pus cependant pas regarder la réaction de Bobby, car Angelus Death m'apostrophait~~, la voix neutre~~ :

- Demande plutôt à Mademoiselle ici présente, elle semble plus douée que moi question vocabulaire ... Peut-être pourra-t-elle même répondre à tes deux questions.

Je souris et ne pus m'empêcher de rire. Merci bien....
- Et bien.... commençai-je en ne sachant pas trop comment formuler. J'imagine que vous savez ce que sont les préliminaires, Le Fay... Seulement, je ne connais pas l'équivalence en anglais...

Je regardai ensuite autour de moi, histoire de répondre à la question sérieuse. Seulement, je ne trouvai rien qui put confirmer ce à quoi je songeai.

- Il me semble - mais je n'en suis pas sûre - que c'est une sorte de cartouche. Hum... On en trouve sur les cadres de tableaux anciens et il permet d'indiquer le nom du peintre, le titre, l'année...

Je haussai les épaules, guère convaincue de ma réponse. Je n'arrivais pas à savoir d'où j'avais bien pus sortir cela, aussi, je m'en méfiais...
- Il n'y a rien d'autre d'écrit ? interrogeai-je en faisant un pas vers Le Fay pour regarder sa feuille.

A l'entendre rire, elle n'avait pas saisi l'ironie de ma phrase. Je haussai les épaules, retournai à mon inventaire et tentai de faire abstraction de sa présence.

― Et bien... J'imagine que vous savez ce que sont les préliminaires, Le Fay ..., entama-t-elle, captant alors toute mon attention, même si je gardais les yeux rivés sur ma feuille.

Le Fay ?

Mademoiselle Faolan appelait-elle tout le monde par son nom de famille ou cette faveur n'était réservé qu'à la gente masculine ? Elle aussi était de ces féministes qui s'auto-proclamaient égales aux hommes ? A mieux observer sa tenue - longue robe et bottes à talons - identique à celles que je l'avais déjà vu porter, on dirait bien que oui ...

"... Seulement, je ne connais pas l'équivalence en anglais..." poursuivit-elle s'excusant presque de ne pas pouvoir traduire le mot !

Okay... ! Là, elle commençait sérieusement à me prendre la tête ... Avait-elle l'intention de lui donner un cours pratique pour le lui expliquer tant qu'elle y était ?

De toute évidence, non. Elle sembla soudain pourvue d'une once de bon sens et dévia sur le second mot. Je l'écoutai alors d'une oreille moins attentive, rassuré par le chemin que semblait prendre la conversation, quand mon regard se porta sur une horloge, similaire à celle que nous avions dans un des petits salons d'Adsav.

Un cartel !

Je souris, moqueur en comprenant qu'elle faisait fausse route sur l'objet, même si théoriquement, elle avait aussi raison. Mais hors de question de la détromper. Je préférais la laisser s'enliser dans ses explications, ne désirant absolument pas lui porter secours ...

"... Il n'y a rien d'autre d'écrit ?" demanda-t-elle alors en s'approchant de Morgan tentant de lire par dessus son clipboard.

― A ce que je vois, vous êtes aussi douée pour expliquer l'un ou l'autre de ces deux mots ... lançai-je sarcastique avant de m'adresser d'une voix plus posée à mon petit-ami. "Cherche plus, M., ton cartel est juste là, sous mon nez. Rien à voir avec ce que Mademoiselle te décrivait," continuai-je avant de me tourner davantage vers Wynn, un sourire moqueur sur les lèvres : "J'ose espérer que vous ne confondiez pas non plus pour la signification du mot préliminaires. Cela pourrait être quelque peu fâcheux. Pour vous, comme pour votre partenaire ..."

Je faillis faire la moue ― demander à 'Mademoiselle' ? Alors qu'elle confondait 'jour' et 'soir' ? Qu'elle se bornait à répéter ses propos pour me prévenir des connotations personnelles du mot 'préliminaires' ? Qu'elle était incapable de comprendre les directives que Bobby Wolfe avait laissées sur nos listes ?

J'étais provoc' mais là, Angel poussait loin...!

― Et bien..., commença 'Mademoiselle' après un léger gloussement. J'imagine que vous savez ce que sont les préliminaires, Le Fay... Seulement, je ne connais pas l'équivalence en anglais...

J'aurais préféré qu'elle n'imagine rien : mes activités personnelles ne la regardaient pas !

« Il me semble, poursuivit-elle, mais je n'en suis pas sûre... »

...le contraire m'aurait étonné...

« ...que c'est une sorte de cartouche. Hum... On en trouve sur les cadres de tableaux anciens et il permet d'indiquer le nom du peintre, le titre, l'année... »

Je haussai le sourcil : le château conservait des plaquettes étiquettes... sans leur tableau ?

« Il n'y a rien d'autre d'écrit ? » interrogea-t-elle en faisant un pas vers moi.

Nothing you would get, I daresay...

― A ce que je vois, vous êtes aussi douée pour expliquer l'un ou l'autre de ces deux mots..., lança Angel avec sarcasme avant de se tourner vers moi : « Cherche plus Em', me dit-il, sa voix adoucie, ton cartel est juste là, sous mon nez. Rien à voir avec ce que Mademoiselle te décrivait... »

Je m'approchai de lui, explorant son côté de la pièce avec attention ― objet doré de style Louis XIV..., me répétais-je en même temps qu'Angel lâchait, caustique :

« J'ose espérer que vous ne confondiez pas non plus pour la signification du mot préliminaires. Cela pourrait être quelque peu fâcheux. Pour vous, comme pour votre partenaire... »

Ne pas rire, m'exhortai-je ― cela me trahirait, nous trahirait ― mais Angel était si délicieusement corrosif !

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- A ce que je vois, vous êtes aussi douée pour expliquer l'un ou l'autre de ces deux mots..., lança Angel sur un ton sarcastique. Cherche plus M., ton cartel est juste là, sous mon nez. Rien à voir avec ce que Mademoiselle te décrivait...

En effet, Angelus Death désignait d'une façon vague une horloge massive, taillée dans un métal doré. Ce n'était pas du tout ce à quoi je songeais. Le Fay s'y approcha, examinant le coin de l'étagère avec attention. Il semblait amusé ce que venait de dire Death.

- J'ose espérer que vous ne confondiez pas non plus pour la signification du mot préliminaires, me dit alors le garçon blond. Cela pourrait être quelque peu fâcheux. Pour vous, comme pour votre partenaire...

Je ne réagis pas tout de suite, mais il était clair qu'il cherchait à me provoquer, à me faire payer le fait que je lui avais pris la tête le jour de notre rencontre. J'étais quand même vexée par son comportement et par les piques qu'il me lançait. Surtout qu'il ne savait pas du tout de quoi il parlait. S'il était toujours ainsi, pas étonnant que sa sœur lui mène la vie dure...

Je me résolus à répondre :
- Dois-je comprendre, monsieur Death, que vous êtes un professionnel en la matière ?

S'il comptait jouer sur ce terrain...

― Ferme tes oreilles M., s'il-te-plait ..., conseillai-je tout bas à Morgan, en insistant sur ma formule de politesse - hachant intentionnellement chaque syllabe.

Je me tournai vers celle qui cherchait la confrontation et sans lâcher son regard, rétorquai, amusé, qu'elle puisse croire que sa question allait me mettre à l'aise :

"Je n'ai jamais eu à rougir de mes compétences en la matière, Mademoiselle Foalan. Sans fausse modestie, je me défends pas mal dans ce domaine ... Vous voulez aussi que je vous le prouve ou ma parole vous suffira-t-elle ?"

Si après ce que je venais de lui dire, elle me cherchait encore des poux, c'est que quelque chose n'allait vraiment pas chez elle !

"Sorry M.", chuchotai-je, avant de faire quelques pas vers une autre étagère.

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Mila !

J'adressai un sourire à la jolie brune, toujours très ravi de la voir : elle avait l'air tellement plus épanouie à présent qu'elle travaillait au château.

― Fais attention, il y a pas mal de poussière, avertis-je alors qu'elle pénétrait dans la pièce, remarquant sa robe country blanche.

Je faillis m'étrangler ― Angel, professionnel des préliminaires ? Mes traits s'assombrirent aussitôt ― Wynn avait une imagination beaucoup trop active ; devait-elle évoquer des choses aussi personnelles ?

― Ferme tes oreilles, M., s'il te plaît, siffla tout bas Angel.

J'eus un très mauvais pressentiment ― que ne devais-je pas écouter ?

« Je n'ai jamais eu à rougir de mes compétences en la matière, Mademoiselle Foalan, reprit Angel avec provocation. Sans fausse modestie, je me défends pas mal dans ce domaine... »

Je pâlis ― défendre la beauté de sa Camélia m'avait déjà porté un coup ; écouter Angel évoquer ses relations sexuelles plus que satisfaisantes avec elle me serrait le coeur.

« Vous voulez aussi que je vous le prouve ou ma parole vous suffira-t-elle ? »

NON !! Pas la peine de le prouver, tout le monde te croit !

― Je vais demander à Wolfe ce qu'est un cartel, déclarai-je avant que Wynn ne réponde qu'elle serait enchantée de le mettre à l'épreuve.

― Je vais demander à Wolfe ce qu'est un cartel, annonça tout à coup Morgan avant que je ne puisse réagir.

Et merde ...!

Qu'est-ce qu'elle avait eu à me provoquer aussi ! Décidément, ce n'était vraiment pas mon jour ... Encore moins celui de Morgan ...

― Hey ...! Tu vas où comme ça ? lui demandai-je, en même temps que je le retenais par le bras. Je l'ai trouvé ton cartel, pas besoin d'aller trouver qui que ce soit ...

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― Ça ira, fis-je, avançant avec précaution parmi les meubles recouverts de draps blancs. Je venais te proposer une tasse de thé, à toi et à tes petits sécheurs. Est-ce que ça va...?

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Mila m'avait révélé avoir fait de la danse, avant, il y avait très longtemps. Aujourd'hui, lorsque je la voyais se déplacer avec tant de grâce, je trouvais dommage qu'elle ait arrêté. Une mauvaise réception, avait-elle expliqué. Etait-ce trop tard pour réparer cela ? Peut-être Alwe pourrait-elle faire quelque chose...

― Parfaitement, lui souris-je. Mes petits sécheurs te remercient mais je crois que je vais attendre avant de les laisser faire une pause...

...alors qu'ils venaient à peine de commencer !

« En revanche, tu me ferais très plaisir de partager avec moi ce thé que tu nous offres ! »

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Angelus Death glissa quelque chose à son camarade que je ne pus entendre. Une fois encore, leur complicité me sauta au yeux -ils étaient décidément très proches.

- Je n'ai jamais eu à rougir de mes compétences en la matière, Mademoiselle Foalan, rétorqua Angelus Death. Sans fausse modestie, je me défends pas mal dans ce domaine ... Vous voulez aussi que je vous le prouve ou ma parole vous suffira-t-elle ?

Je failli éclater de rire, mais je me retins, esquissant seulement un sourire. Tiens donc ? Le plus comique fut le moment où Morgan Le Fay s'éloigna, prétextant demander à Bobby ce qu'était un cartel. Le blond cessa de s'intéresser à moi et glissa au brun :
- Hey ...! Tu vas où comme ça ? Je l'ai trouvé ton cartel, pas besoin d'aller trouver qui que ce soit ...

Le retenant par le bras, Angelus empêchait Morgan de s'en aller plus loin. Finalement, Death se désintéressa complètement de moi - avait-il abandonné la partie ? Cela ne m'étonnait pas - il m'avait déjà platement lâché le matin où l'on s'était rencontré alors qu'il allait courir. Ce n'était donc pas nouveau...

Courageux, mais pas téméraire !

Je m'étais approchée d'une étagère, cochant sur ma feuille les objets que j'y voyais : cage à oiseaux, boîtes en tout genre et chandeliers. De quoi faire un énorme vide-grenier ! Je n'avais nullement l'intention de rester plantée devant les deux garçons avant qu'ils ne se reconcentrent sur moi.

J'en profitai alors pour observer Bobby et la nouvelle venue. Elle était en train de lui présenter son plateau, lui proposant sûrement une tasse. De là où j'étais, je ne parvenais pas à saisir la conversation, mais je les vis échanger un sourire. Sans trop savoir pourquoi, j'étais partagée entre la déception et la résignation.

Bobby me plaisait, assurément, mais je savais aussi que je n'avais rien à attendre de lui...

J'étais frustré ― extremely so ― d'être privé de la chaleur de ses bras alors que je désespérais d'avoir un câlin ; à la place, je n'avais que sa main retenant mon bras ― un contact qui n'offrait pas le réconfort recherché.

― Okay, répondis-je aussi neutre que possible, hésitant à reposer ma question ― à savoir, ce qu'était un cartel : hier, Angel s'était moqué lorsque je lui avais demandé ce qu'était une sortie ; aujourd'hui... aujourd'hui, c'était de ma faute...

« Je peux le cocher donc, » finis-je par dire. Je chercherais le mot tout à l'heure...

Un Morgan neutre, était un Morgan contrarié ...

Tout comme la veille, sur les toits, il arborait son masque d'impassibilité. Celui qu'il avait revêtu quand mes paroles l'avaient blessé. Nous n'étions peut-être ensemble que depuis peu, mais c'était comme si je le connaissais depuis des siècles ...

― C'est une horloge, Morgan ... murmurai-je, pour n’être entendu que de lui seul. Rien à voir avec ce que Wynn te décrivait, lui prouvai-je en pointant l'objet du doigt. Je sais ce que c'est, car nous en avons un à Adsav.

J'effleurai discrètement sa main de la mienne et continuai tout aussi bas, légèrement nostalgique :

"Un jour, je t’emmènerai là-bas, à Adsav, précisai-je. Je te montrerai toutes les antiquités qui emplissent les pièces du manoir ... Nous dégusterons un chocolat chaud devant un feu de cheminée et je te raconterai nos histoires de famille ..."

Je décidai de changer de sujet, incapable de jouer la comédie sur des projets qui ne se réaliseraient jamais et qui me faisaient plus de mal que de bien :

"Je suppose que tu n'as pas fermé tes oreilles ... Je n'ai fait que jouer son jeu M., rien d'autre... Ne prends pas mes mots pour argent comptant, s'il te plait ..." m'exhortai-je à lui faire comprendre, sachant comment il avait pu interpréter mes dernières paroles ... "Cette fille n'est qu'une empêcheuse de tourner en rond et cela, je l'ai remarqué depuis la première minute où je l'ai aperçu."

― Angel..., interrompis-je faiblement. Ce n'est pas grave... Je ne vais pas te reprocher d'être... doué...

J'évitai de m'étaler ― j'avais beau comprendre qu'il avait un passé, je ne désirais pas, à l'instar de Mademoiselle l'Empêcheuse de Tourner en Rond (je devrais lui trouver un nom plus court), imaginer Angel en 'activité personnelle' avec...

...je fermai les yeux et passai ma main dans mes cheveux ― avec personne.

Je rouvris les paupières et, essayant de me ressaisir, j'offris à Angel un petit sourire.

« Cela me ferait très plaisir de t'accompagner à Adsav, repris-je, n'élevant toujours pas la voix. Que ce soit pour les antiquités ou le chocolat chaud... »

Nous en faisions rarement, au manoir : Lord Witherby n'aimait pas particulièrement le sucre et voyait le chocolat comme une tentation pour les faibles.

Tentation à laquelle, je devais l'avouer, je cédais lorsque je le pouvais...

Morgan avait beau faire comme si ce n'était pas grave, je n'étais pas dupe... Je ne voulais pas envenimer son malaise aussi je préférais clore le sujet et éviter d'y revenir avant le siècle prochain, si possible ...

― Ne bouge pas, je reviens ... glissai-je à son oreille avant de m'avancer vers Bobby et Mila.

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Je répondis par un sourire, ravie de cette invitation.

― Cinq petites minutes, alors, concédai-je en regardant autour de nous, à a recherche d'un endroit où poser mon plateau...

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― Attends, je te débarrasse, dis-je en prenant le plateau de ses mains pour le poser...

...un peu plus loin, sur une desserte recouverte d'un drap, comme tous les meubles de cette pièce.

Mila me suivit avec sa grâce naturelle et je nous servis. Je savais qu'elle faisait le tour des salles des professeurs et de l'administration pour servir une tasse de thé au staff de l'école, et j'avais toujours trouvé cette attention charmante.

« Alors, ça va toujours avec tes cours ? » m'enquis-je.

Alors que j'avançai vers l'entrée du débarras, Bobby Wolfe s'en éloignait - plateau et service en mains - suivi de près par Mila. J'attendis qu'ils s'arrêtent avant de les rejoindre.

— Alors, ça va toujours avec tes cours ? la questionna le jeune homme, après avoir posé son fardeau sur une desserte et entamé le service.

Je n'avais pas eu l'intention d'écouter aux portes et malgré que la jeune femme partage quelques cours avec moi, la conversation ne me regardait pas ! Je toussotai légèrement pour les prévenir de ma présence.

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Avant que je ne réponde, un léger toussotement nous interrompit : Angelus ― le 'damoiseau de Morgan', comme le nommait Jole ― avaient délaissé ses camarades. C'était un beau garçon qui partageait certain de mes cours, ses longs cheveux clairs contrastant avec son teint hâlé, ses yeux bruns tirant sur le caramel, ses pommettes saillantes ajoutant un relief superbe à ses traits ― devais-je m'étonner que Morgan ait craqué sur lui ?

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Angelus Death...

Je baissai mon thé encore brûlant mais ne la reposai pas.

― Qu'est-ce qu'il y a ? m'enquis-je, me demandant ce qu'il désirait.

Derrière lui, la petite Wynn poursuivait l'inventaire près d'une étagère ; Morgan Le Fay, jetait des coups d'oeil vers nous avant de se repencher sur son clipboard...

Je ne m'étais pas attendu à devenir son élève préféré - surtout après notre escapade de la veille - mais il pouvait être un peu plus aimable en s'adressant à moi ... A moins que cela n'ait a voir avec le fait que je l'interrompe en plein tête à tête.

Je ne résistai pas à mon envie de sourire et lançai même un regard entendu à la jeune femme, avant de revenir à Bobby.

― Il y a que Morgan ne se sent pas très bien ..., commençai-je en glissant un regard par dessus mon épaule, le désignant - comme si il pouvait avoir confusion sur la personne ...!

"...et comme il n'ose pas venir lui-même ..."

Je marquai une légère pause , tentant de donner le plus de crédibilité possible à mon mensonge...

"... je viens vous demander l'autorisation de lui faire prendre l'air quelques instants ..."

Plus qu'à attendre...