Rencontres dans le labyrinthe

Jour de pluie. Pluie battante, pluie diluvienne. Pluie bretonne. Pluie qui remettait mon observation du parc à demain. Le ciel semblait compatir à ma mise à la porte, suite à l'épisode de la veille ― épisode que je préférais mettre de côté ; Angel ne valait pas la peine que je pense à lui !

A la place, je parcourais le labyrinthe du deuxième étage, intrigué par cet étrange enchevêtrement de couloirs, tapissés d'épaisses étoffes de brocart d'un rouge sombre : à quoi servaient-ils ? Car devait forcément y avoir une raison à une telle occupation d'espace...

Une étrange forme recouverte d'un drap jaune attira mon attention : elle ressemblait à une énorme cloche sous laquelle je percevais un bruissement étouffé. Intrigué, je m'approchai... qu'était-ce qui se cachait dessous ?

Je tendis doucement le bras et saisis le bout de l'étoffe, la retirai avec précaution...

...dévoilant un perroquet vert !

Je souris.

― Aurait-on oublié ? demandais-je en repliant le drap.

Celui-ci poussa un petit cri strident.

― Qui es-tu, qui es-tu ? causa-t-il d'une voix aiguë.

Je posai le drap à côté de la cage en fer forgé.

― Morgan Le Fay, pour te servir, répondis-je amusé, me demandant quelle serait la suite : certains perroquets étaient dressés pour enchaîner une série de questions après chaque réponse...

― Morgan, répéta-t-il. Morgan Le Fay ! Loulou veut cracker ! Loulou aide Morgan pour cracker !

Petit maître-chanteur !

― Tu m'aideras pour un cracker ? dis-je. Et comment m'aideras-tu ?

Le perroquet s'ébouriffa.

― Cracker ! s'écria-t-il. Cracker d'abord !

Je voyais...

― Ton cracker attendra, je le crains : je n'en ai pas avec moi !

L'oiseau resta coi un moment avant de reprendre :

― Qui es-tu, qui es-tu ?

...depuis le début ?

C'est alors que je tournais la tête : une jeune fille aux cheveux bleus était là...

Après cet épisode dans les sous-sols qui m'avait laissé plus que troublé, j'étais allé déjeuné avec Songe, puis je lui avais faussé compagnie et avais décidé de prendre un peu de "hauteur", de m'éloigner de ces sombres et poussiéreux couloirs de pierre. Alors, avançant au hasard, j'avais gravis les escaliers, et me retrouvais donc au deuxième étage. Le rouge sombre qui décorait ces lieux me paraissait plus rassurant que les profondeurs du château.

J'ignorais ce que j'allais faire ici, mais peu importait. Il fallait que je calme mon trouble et mon angoisse. Ce qu'il s'était passé n'était pas anodin, j'en étais certaine, et j'avais le pressentiment que j'entendrais de nouveau parler de ce Sandro...

Une voix aiguë me sortit de mes réflexions, une voix quémandant... des crackers ?
Me dirigeant dans sa direction, je finis par apercevoir un jeune homme qui me tournait le dos, et qui était visiblement en conversation avec un perroquet vert. C'était cet animal qui réclamait à manger.

J'allais entreprendre un discret demi-tour quand la voix du perroquet m'interpella.

― Qui es-tu, qui es-tu ?

je me figeais, tandis que le garçon se tournait vers moi et me dévisageait. Je ne savais pas quoi faire, mais je me doutais que partir sans rien dire n'était pas envisageable. Alors je me lançais.

― Euh... salut... je... Je suis Cléophée. Cléophée Ravenwood.

― Euh... salut..., begaya la feune fille. Je... Je suis Cléophée. Cléophée Ravenwood.

― Cléophée ! causa le perroquet avant que je ne puisse me présenter. Cléophée Ravenwood ! Loulou veut cracker !

― Il t'aidera pour un cracker, ajoutai-je alors que l'oiseau battait des ailes.

Puis je tendais la main : « Morgan Le Fay... Je vois que je ne suis pas le seul matinal ! »

Il me tendit la main et, après une demi-seconde d'hésitation, je la saisis.

― En effet, tu n'es pas le seul. Disons que je dors plutôt mal en ce moment. Je reportais mon attention sur le volatile derrière Morgan. Je ne savais pas que les perroquets aimaient les crackers.... il est assez étrange celui-ci...

― En effet, tu n'es pas le seul, répondit sombrement la jeune fille. Disons que je dors plutôt mal en ce moment...

Cela se voyait ― son teint était terne et elle avait de légers cernes sous les yeux.

« Je ne savais pas que les perroquets aimaient les crackers..., poursuivit-elle, déportant son attention sur la cage. Il est assez étrange celui-ci... »

Je haussai les épaules :

― Les perroquets anglais aiment les crackers, fis-je amusé avant de m'adresser à l'oiseau : « Loulou wants a cracker ? »

Le perroquet répondit par un petit cri aigu :

― Loulou veut cracker ! Loulou aide Morgan pour cracker ! Loulou aide Cléo pour Cracker !

― A croire que personne ne te nourrit ! fis-je.

Je prenais toutefois note de lui ramener un cracker après les cours : Loulou m'amusait !

― Alors..., repris-je, me tournant vers Cléophée. Qu'est-ce qui t'amène de ce côté du Château ?

J’eus un petit sourire amusé en le voyant discuter avec l'oiseau. Apparemment, la pauvre bête ne mangeait pas souvent. Ou alors c'est qu'elle était tout le temps affamé, au choix.

Cela dit, je me demandais ce qu'il voulait dire en clamant haut et fort qu'il aiderait pour un cracker... Comment un oiseau serait-il en mesure d'aider quelqu'un ? Je ne comprenais pas vraiment.

― Alors..., reprit Morgan en se tournant vers moi. Qu'est-ce qui t'amène de ce côté du Château ?

― Hum... je cherchais le calme. Ces derniers jours n'ont pas été des plus... classiques, et je cherchais à m'éloigner de tout ça. Je soupirais. Je pense qu'on peut dire que je fuyais ma peur...

― Hum..., commença Cléophée, hésitante. Je cherchais le calme. Ces derniers jours n'ont pas été des plus... classiques, et je cherchais à m'éloigner de tout ça.

Elle soupira, lasse.

« Je pense qu'on peut dire que je fuyais ma peur... »

Je haussai le sourcil :

― Peur... c'est un terme assez fort. Mais qu'est-ce qui pourrait t'effrayer entre ses murs ?

N'étions-nous pas dans la demeure de Merlin, un des plus grand Mage de l'Histoire ?

Difficile à expliquer. Et difficile à comprendre pour lui je suppose.

― Les sous-sols, murmurais-je.

Je n'arrivais pas à me décider si ça avait été une bonne chose qu'on y aille. Certes, Sandro était revenu de je ne sais où grâce à ça, mais le fait que j'étais persuadée que tout était lié à moi ne me quittait pas. Peut-être que je me faisais des idées.

― On... J'y suis allée avec Songe, je ne sais pas si tu l'a rencontrée... et il s'est passé des choses... étranges. Je crois que c'est ma magie qui a fait ça, mais je n'en suis pas certaine. Et j'ai peur de ce que je pourrais faire sans le vouloir... Désolée, c'est plutôt compliqué.

― Quelles choses ? demandai-je, fronçant les sourcils. Que s'est-il passé ? De quelle Magie parles-tu ?

Et, note à moi-même :
• explorer les sous-sols ce soir
• éviter de croiser l'homme à tout faire
• en parler à Lord Witherby aussi tôt que possible

Je ne trouvais pas que cela posait problème de lui raconter, alors je me lançais.

― Eh bien... Ca à commencer pour le cauchemar que j'ai fait, ou j'explorai les sous-sols et où je rencontrais un homme étrange qui semblait me connaitre et qui me parlait de ma... nécromancie. Le lendemain matin, Songe m'a entrainée sur les lieux, et c'était exactement comme dans le rêve. Je ne voulais pas y aller, mais quelque chose m'y poussait tout de même. Je fis une pause pour reprendre mon souffle. Et puis, on a fini par arriver dans une salle étrange, où il y avait trois statues au centre. Le problème, c'est qu'il n'y avait que moi qui les voyait, pas Songe. Et sans le faire exprès, elle en a effleuré une et... là ça devient vraiment bizarre. Il y a.... quelque chose dans la pièce, peut-être de la magie, qui a appelé la mienne, et un type a surgi de la statue et s'est écroulé sur moi. C'était celui du rêve bon sang !! Il nous a juste dit son nom, puis nous a demandé de l'aider à remonter dans les étages. A peine sorti des escaliers du sous-sol, il a croisé... Bobby je crois, et il est parti avec, probablement à l'infirmerie. Ou voir le directeur peut-être, j'en sais rien.

Tout raconter m'avait presque enlevé ce poids des épaules, mais je ne pouvais pas totalement me défaire de cette histoire.

― Enfin, voilà ce qu'il s'est passé. Et ça me... tourmente. J'ai l'impression que ce n'est pas vraiment terminé...

Et, note à moi-même :
Révision des priorités
• se faire une amie de Cléophée
• parler à Lord Witherby aussi tôt que possible
• explorer les sous-sols ce soir
• éviter de croiser l'homme à tout faire

― Tu es une Nécromante doublée d'une Rêveuse ? m'enquis-je, curieux. Ce sont des dons rares...

― Eh bien, je ne sais pas trop. Nécromante c'est certain, mais rêveuse... c'est peut-être juste le fait que j'ai été en présence de la magie des plantes de Songe quand j'ai rêvé, je ne sais pas.... mais en tout cas il m'arrive d'enflammer des choses, sans le vouloir... je ne contrôle pas vraiment ce que je fais.

En disant cela, je pris conscience que je pouvais être dangereuse, pour moi-même mais aussi pour les autres. Je grimaçais face à cette révélation.

La Magie des plantes ― quelle qu'elle puisse être ― ne pouvait raisonnablement être liée aux rêves ; aussi, si son amie ne portait le nom de Songe, je n'y aurais sans doute pas prêté attention...

― Tu maîtrises mal ta Magie, déclarai-je, tout en pensant qu'elle était peut-être sous l'influence d'un esprit qui cherchait à la contrôler...

...quoique cela ne paraissait pas tenir debout : des personnes sortant de statues invisibles n'étaient pas du fait de la Nécromancie ! Il fallait réellement que je parle à Lord Witherby au plus vite...

« Comment as-tu découvert ta Nécromancie ? demandai-je. Ce n'est pas courant. »

Et d'habitude, les Nécromants évitaient de parler de leur don...

Homme à tout faire Messages : 324

Attention, Cléophée !

Je te rappelle que dans le sujet Le passager sur le seuil, tu dis venir d'ici... Evidemment, il est possible que tu ais déjà petit déjeuné avec Songe ; il faudra seulement en prendre compte !

Exact ^^ léger soucis technique, je vais modifier ma "provenance" dans mon premier post ici.

― Comment je l'ai découvert ? Eh bien....

J'hésitais un instant, ne sachant pas si je devais lui raconter ou non. En même temps, ce n'était pas vraiment un secret, plutôt un épisode de mon passé troublé avec mes parents.

― En fait, c'est plutôt les esprits qui m'ont trouvé. Ca s'est déclenché assez tôt, je ne sais pas à quel âge exactement. Mais mes parents n'ont pas apprécié. Pas du tout. Ils étaient guérisseurs eux... Enfin bref. Les esprits ont commencé à me souffler leurs envies, mais au début je ne les comprenais pas. La compréhension est venue plus tard.

Des parents guérisseurs... cela expliquait son affinité avec l'Elément du Feu.

Plus intrigant : c'était les esprits qui la trouvait ! Elle devait être de nature assez influençable.

― Les écoutes-tu, des fois ? Que te demandent-ils...?

Etait-il juste curieux, ou tentait-il de me soutirer des informations ? Je voulais lui faire confiance, il ne me semblait pas méchant ni conspirateur...

― Disons que c'est parfois assez compliqué. Le plus souvent, c'est assez confus ce qu'ils disent, et je ne les comprends pas vraiment. Mais en général, ils veulent surtout discuter, et en échange ils m'aident. C'est l'un d'eux qui m'a aidé à trouvé le chemin jusqu'ici. Je fis une pause. Mais parfois, certains ont des desseins plus... sombres. Il y en a eu un, une fois, qui voulait que je tue quelqu'un. Je ne l'ai pas écouté, et il m'a harcelé pendant trois jours. Puis il a laissé tombé.

Je hochai la tête, prenant note.

― Et toi, que veux-tu ? demandai-je.

Histoire de paraître prévenant. Petit sourire compatissant aux lèvres.

― Ce que je veux ? En vérité, je l'ignore.

je me tus, perturbée. C'était vrai. Qu'est-ce que je cherchais ? Pourquoi étais-je venue ici, hormis pour fuir la demeure familiale ? Je n'en avais aucune idée.

― Peut-être que je cherche... où est ma place...

La réponse de Cléophée ne m'étonna guère : elle paraissait à ne pas trop savoir ce qu'elle voulait, se laissant mener par les autres sans trop réfléchir.

― Comme beaucoup d'entre nous, fis-je compréhensif... heureux que ce ne fût pas mon cas !

Je n'ignorais pas que Lord Witherby avait des plans en ce qui me concernait ; de grands plans.

« Je comptais explorer ce labyrinthe jusqu'au bout ― tu m'accompagne ? demandais-je. Il nous reste encore une petite demi heure avant que les cours ne commencent... »

J'ignorai pourquoi, mais j'eus l'impression que ma réponse ne le surpris pas. En même temps, je réalisai que je ne savais rien de lui. Mine de rien, il m'avait posé des questions et n'avait rien révélé de lui.

― Je comptais explorer ce labyrinthe jusqu'au bout ― tu m'accompagne ? demandais-je. Il nous reste encore une petite demi heure avant que les cours ne commencent...

― Avec plaisir, cet endroit est intrigant.

Et je comptais bien tenter de lui soutirer quelques informations durant cette fin de visite...

Cléophée accepta ma proposition et, après un petit geste d'au revoir à Loulou qui battit des ailes et lâcha un ultime petit cri aigu, nous poursuivîmes notre exploration des couloirs.

― Fascinant, je dirais même, répondis-je. Tellement so que je ne peux m'empêcher de vouloir tout croquer !

Faux, évidemment, mais ainsi, Cléophée pourrait mettre en avant ma fascination pour les lieux si jamais d'autres élèves s'interrogeaient sur le fait que je passais ces premiers jours à tout dessiner dans mon carnet ― et que je recopiais à l'aide d'un sort dans mon Gémeau...

« Si cela te tente, nous pourrions visiter d'autres parties du château plus tard... »

Fascinant ? Certes, cet endroit l'était, mais malgré son affirmation, j'avais la sensation qu'il ne le pensait pas vraiment. Mais qui étais-je pour tenter de deviner ce qu'il pensait vraiment ? Après tout, je ne le connaissais pas.

― Croquer ? Tu dessines donc ? Est-ce par passion ou... pour une autre raison ? Un silence de ma part, puis je rajoutais : excuse ma curiosité si ça ma question te semble déplacée.

Mais lui ne s'était pas gêné, il ne pouvait pas m'en vouloir de chercher à en savoir un peu plus sur lui.

― Sinon, pour répondre à ta question, je serais ravie de visiter d'autres parties du château.

― Tu es tout excusée, répondis-je avec une oeillade malicieuse. A vrai dire, cela ne me dérange pas !

Je sortis de mon sac en bandoulière mon carnet de croquis et l'ouvris en même temps que nous avancions...

« J'ai commencé avec le parc, dis-je en lui montrant les croquis du jardin aux nains. Je pensais en faire d'autres aujourd'hui mais avec la pluie, je me suis rabattu sur le château ! »

Je tournai les pages : « Les farfadets... »

Ils m'avaient particulièrement intrigué...!

« Tu as une préférence, au fait, pour la visite du château ? »

Curieuse, j'observais ses dessins avec attention. Il avait du talent, c'était indéniable. Les farfadets m'intriguèrent, je n'en avais encore jamais vu.

― Tu es doué, le complimentais-je. C'est pas de chance qu'il pleuve, l’extérieur est superbe et peut donner, je pense, de très beaux dessins. Sinon, pour la visite, non je n'ai pas de préférence. En fait, je ne connais rien de cet endroit, hormis la bibliothèque, les sous-sols et ma chambre.

» Rencontres dans le foyer
» Les inconnus dans la maison
» Rendez-vous dans le hall
» Rencontre dans le jardin aux nains
» Pause lecture dans le foyer