[Elève] Morgan Le Fay

.. Morgan Le Fay ..

[Le personnage étant anglais, j'ai pris la peine de mettre en blanc les moments où il s'exprime dans sa langue maternelle. Pour des raisons pratiques et afin de ne pas compliquer mon jeu, j'ai laissé en noir — en français, donc — ses pensées et ses réflexions, même si logiquement, elles aussi se font en anglais dans sa tête.]

.. X ..

— Vous êtes délicieusement provocant ! fis-je, lèvres retroussées, à l’homme assis derrière l’imposante table de travail en bois noir, aux pieds arqués et finement ouvragés.

You are deliciously provoking !

Witherby me fit signe de m’asseoir, et j’obéis, me calant dans une des élégantes chaises médaillon.

« Tenez-vous réellement à ce que j’intègre cette école ? » demandai-je, mes yeux bleu cobalt rencontrant son regard sombre.

Do you really want me to get into that school?

C’était un homme d’âge mûr, la cinquantaine passée, auquel la mèche blanche de ses cheveux noir charbon conférait des airs sages et distingués. Ce qu’il était, incontestablement : tout chez le notaire rayonnait de grandeur recherchée et raffinée, de sa moue sévère à son habit gris et sobre, fait sur mesure par le meilleur tailleur londonien.

— Plus que vous ne pourriez l’imaginer, mon garçon, répondit austèrement Witherby.

More than you can imagine, son.

Mon garçon. Un sourire effleura mes lèvres. Je trouvais cela aussi tout à fait provocant de sa part ; et en même temps, presque touchant.

La relation entre Witherby et moi-même était étrange : légalement, c’était mon gardien. Il m’avait élevé, blanchi, nourri, envoyé dans les meilleures écoles, et parfait mon apprentissage de leçons toutes particulières, m’accordant son temps — pourtant précieux — lorsque j’en avais éprouvé la nécessité.

Tel un père, auraient avancé certains.

A cela près que les seules marques d’affection qu’il m’avait jamais témoignées se limitaient à un banal « mon garçon ». Lord Witherby se gardait bien de montrer ses émotions, et davantage encore celles qu’il aurait éprouvées à mon égard : se faire aurait été signe de faiblesse. Par ailleurs, je n’étais — officiellement — que le fils d’un ancien ami décédé il y avait des années qu’il avait recueilli afin d’aider sa mère, restée dans le comté d’Eastborough…

…une mère que je ne connaissais guère ; une mère que je n’avais jamais visitée, et qui n’était jamais descendue me voir non plus.

Elle est très occupée, m’avait un jour dit Witherby. Vous pouvez lui écrire si vous le désirez. Je lui transmettrai votre missive.

She is very busy. You can write to her if you want. I will deliver your letter.

Me répondra-t-elle ? avais-je alors demandé.

Will she write back ?

Le notaire avait secoué la tête : Je crains que non, mon garçon.

I’m afraid not, son.

Je n’avais donc jamais pris la peine de même commencer une lettre.

A vrai dire, j’avais, dès huit ans, soupçonné que la vérité n’était pas celle que m’avait rapportée Witherby : l’homme n’avait pas d’enfants et, clairement, n’en aurait jamais naturellement. Peut-être était-il stérile, peut-être était-il impuissant, peut-être préférait-il les hommes, qu’en savais-je — cela ne me préoccupait pas ! Quelle qu’en était la raison, je comprenais seulement que Witherby avait cherché à combler ce manque de descendance…

…en recueillant un enfant que personne ne réclamerait jamais. Un orphelin, en toute probabilité.

Moi.

Avouer cela, néanmoins, aurait été scandaleux : la première version était préférable pour sauvegarder les apparences.

Je me prêtais volontiers au jeu : après tout, d’enfant abandonné, je me retrouvais fils de Lord, héritier d’un manoir — et peut-être même de tout ce que possédait le notaire ! Et puis, si Witherby m’avait adopté, il devait forcément éprouver de l’affection à mon égard. D’ailleurs, le nom que je portais en attestait : seul un parent aimant — et provocateur, comme savait l’être le notaire — pouvait oser appeler son enfant Le Fay. Morgan Le Fay. Telle la célèbre Fée Morgane. J’étais fier et flatté de porter ce nom : il marquait les esprits autant qu’il témoignait de l’intérêt que l’homme me portait.

— Si tel est votre désir, répondis-je d’un sourire amusé, je m’y plierai.

If that is what you wish, I shall submit to your desires.

Witherby hocha la tête d’approbation : il était satisfait. J’attendis donc qu’il me laissât disposer. Au lieu de cela, le notaire ouvrit l’un de ses tiroirs :

— J’ai un cadeau pour vous, fit-il en retirant un livre épais, relié d’une couverture de cuir brune et rouge.

I have a gift for you.

Je pris l’œuvre tendue et la retourna : Contes d’Autremer.

Je levai un sourcil et regardai Witherby d’un air un brin sceptique, tout à fait inquisiteur : des contes ? A dix-sept ans, n’avais-je pas passé l’âge ? Je m’étais attendu à un essai sur la magie ou tout autre ouvrage traitant de sorcellerie ! Connaissant l’homme, néanmoins, je me doutais qu’il y avait davantage à ce livre que l’œil humain ne pouvait déceler.

« Votre doigt, sur la pierre, » commanda le notaire, compendieux.

Your finger, on the stone.

Mes yeux se posèrent sur le cristal au centre d’une étoile à huit branches, taillé comme un diamant de verre. Je passai le pouce dessus, caressant la pierre lisse lorsque —

— Aïe !

Ouch !

Je retirai vivement mon doigt : une des piques cerclant le cristal s’était enfoncée dans ma chair et une perle de sang ornait mon pouce. Elle tomba sur la pierre de verre, et le diamant, absorbant la larme grenat, vira au rouge rubis.

« Félicitation, Morgan, reprit Witherby. Vous êtes désormais le propriétaire à part entière de ce livre. Pour tout autre que vous, il ne refermera que des contes de fée, de dragon et de chevalier. Ouvrez-le, et vous y verrez tout que j’aurais écrit dans son Gémeau ; écrivez dans ses pages, et je verrai de mon côté ce que vous y relaterez. »

Congratulations, Morgan: you are now the sole owner of this book. For anyone else, it will contain nothing but dragon, knight and fairy tales. Open it, and you shall find all I will have written its Gemini; write in it, and I shall see on my side everything you have recorded.

Je portai mon pouce à mes lèvres et suçai la goutte de sang.

— Pratique, répondis-je avec moins d’émotion — et de conviction — que la bienséance ne l’aurait voulu.

Handy.

Pourtant, c’était un beau cadeau.

« Merci, » ajoutai-je sincèrement.

Thank you.

Lord Witherby accepta mes remerciements d’un revers de la main.

— Je vous demanderai, avant de vous présenter à l’Ecole de Merlin, de régler quelques affaires en mon nom, poursuivit-il.

I will ask you to sort out a few private matters on my behalf before you show up at Merlin’s school.

J’acquiesçai d’un signe de tête. Ce n’était pas la première fois. Witherby me faisait confiance pour être discret : je ne posais jamais de question, ne cherchais pas à en savoir davantage que ce qu’il ne me disait — c'est-à-dire, très peu.

« Ce sera tout, fit le notaire. Vous pouvez disposer. »

We are done. You may leave.

Je pris donc congé de mon gardien et sortis de la pièce avec une légère révérence.

.. X ..

Deux semaines s’étaient écoulées. A la demande de Witherby, je les avais passées à réviser — le français, naturellement, mais aussi des cours de potions, de charmes, d’alchimie et d’arithmomancie. Cela me convenait : j’aimais apprendre, ma soif de connaissance quasi inépuisable.

A présent, je m’attelais à faire mes bagages — c'est-à-dire, superviser les valets qui se chargeaient de remplir mes malles : je passais en revue les habits que le tailleur avait spécialement confectionné pour ma nouvelle scolarité, faisais emballer quatre nouvelles paires de bottes et mettre de côté quelques costumes de soirée. C’était une tâche ennuyeuse, et je ne m’y contraignais que parce que je ne pouvais faire autrement. Heureusement encore que d’autres rangeaient les vêtements à ma place !

Les seules choses dont je devrais personnellement m’occuper — plus tard — étaient le livre des correspondances et des lettres à remettre que Witherby m’avait confiées. A vrai dire, je les avais déjà placés dans un petit coffre à cinq serrures dont je gardais les clés à une chaîne autour de mon cou. J’avais ordre de faire un crochet par Paris avant d’intégrer l’Ecole de Brocéliande à la rentrée.

Je me demandais comment Merlin avait réagi face à ma demande d’inscription : le nom de « Morgan Le Fay » devait éveiller chez le vieux mage bien des choses, et des souvenirs des moins agréables ! Comment réagirait-il en me voyant ? Witherby disait que j’avais avec la légendaire enchanteresse une ressemblance des plus troublantes. Troublerais-je Merlin autant que le notaire le pensait ?

Thank You Morgan !
S'il est un personnage dont il me tarde de faire la connaissance, je pense que Morgan se situe en tête de liste.
Le seul point commun que je perçois avec Kam est: ils sont tous deux orphelins !
Je ne pense pas pouvoir trouver pire extrême que Morgan Le Fay.
J'attends avec impatience de découvrir si le portrait si peu élogieux que je me fais de Morgan abonde dans le sens de tes pensées.
Je peux me permettre ? Ton avatar est juste "Waouh" !

Les rencontres entre persos ont toutes leur intérêt d'autant que là moitié se base sur un rapport de force ! Par ailleurs, les différences de personnalité, d'éducation, de culture et de race rendent l'ensemble plus captivant encore !

Hâte de jouer, et ce, avec vous tous !

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